Rock city guide : les villes qui ont changé le cours de la musique

Nashville, Tennessee. Austin, Texas, Los Angeles, Californie. Memphis, Tennessee, La Nouvelle-Orléans, Louisiane. Manchester, Angleterre. Chicago, Illinois. Bourganeuf, Creuse... Toutes ces villes partagent une fierté militante et une foi inébranlable en leurs propres importance et rayonnement : elles sont la capitale mondiale du rock et de sa descendance. Point à la ligne. Des villes voisines, parfois éloignées de quelques kilomètres seulement, offrent ainsi des haines éternelles, des moqueries illimitées. L'esprit de clocher rejoint l'arrogance des chapelles.

Et le pire dans ce concours de beats, dans ce concert assourdissant de fanfaronnades, c'est que ces villes et leurs scènes ont souvent eu raison. Leur règne n'a parfois duré qu'un week-end ou, au contraire, s'est imposé sur des décennies. Mais les vingt-neuf villes que ce livre raconte ont irrémédiablement changé le destin des musiques populaires. Certaines l'ont même inventé à partir de lambeaux de cultures et de traditions déformées, de la soul à la techno, du reggae à la house, du psychédélisme au hip-hop...

Pour raconter ces villes, ces hasards, ces personnages et ces musiques venues de nulle part, nous avons choisi parfois de nous limiter à un détail, à une microscène, à quelques pixels de l'immense photo. La plupart du temps, nous avons simplement relaté l'histoire, son énormité, sa mythologie exagérée par ses participants. Le rock et ses enfants et petits-enfants, aujourd'hui si disciplinés dans un commerce qui ne tolère qu'avec des pincettes les rebelles et sauvageons, sont pourtant nés de parents indignes, marginaux, hors-la-loi. Avec l'avènement dans les années 1950 de l'Adolescent, la jeunesse mondiale s'est inventé, en une frénésie sans fin, la BO de son existence libérée. Peu de pays et de communautés ont été épargnés par cette révolution, dont on mesure aujourd'hui encore les retombées. Il fallait cartographier ces spasmes, ces frottements tectoniques entre les styles et les époques, suivre ces milliers de ramifications. Nous avons donc vogué d'est (Berlin Est) en ouest (West Coast) ; du nord (Islande) au sud (Nouvelle-Zélande) pour interroger vingt-neuf villes, dont certaines françaises ou belges, sur leur rôle et influence dans l'arbre généalogique des musiques vivantes, dansantes et mutantes. Nous avons recensé les disquaires qui ont construit ces scènes, centres fondamentaux d'échanges, de propagande et d'engueulades sans fin. Car la musique n'est pas ici une question de vie ou de mort. C'est bien plus grave que ça.